Archive for the ‘Collaboration’ Category

Un enjeu électoral qui devrait faire l’unanimité

octobre 29, 2008

Je m’apprêtais à faire revivre ce blogue, tombé en pré-hibernation à cause d’un contrat trop prenant pour faire autre chose, quand est parue hier sur le blogue de Patricia Tessier cette lettre au premier ministre québécois pour lui demander de s’inspirer de son mentor Nicolas Sarkosy et doter le Québec d’un plan numérique. À la suggestion de Patricia, je la relaie ici en l’endossant et en souhaitant que cette campagne électorale soit effectivement l’occasion de discuter de cet enjeu majeur pour l’avenir de notre nation. 

J’y souscris d’autant plus que la promesse d’une technologie neutre et le plus à jour possible favorisera notre collaboration localement et notre rayonnement à l’étranger en français, en anglais, en espagnol et dans toutes les langues où notre apport pourra être valable. Et si on y prend goût, on découvrira peut-être que la maîtrise de ces outils de communication est la clé de notre responsabilisation grandissante et de la prise en charge complète de notre destin.

On devrait peut-être commencer par la santé et enclencher enfin le réseautage électronique complet du réseau jusqu’au médecin de famille où tous les intervenants auraient accès au dossier des patients sur cartes à puce. Quand j’y pense, je trouve ça effarant que mon fils travaille aux archives papier du CHUM pendant ses vacances. Il me semble qu’on pourrait l’exploiter à meilleur escient à plein d’autres activités.

Et qu’en est-il de la fameuse réingénierie du gouvernement qu’on nous avait promise. On a fait le dos rond beaucoup trop facilement face aux pressions des syndicats qui s’y sont opposés d’entrée de jeu. Qu’on soit de droite ou de gauche, on ne peut que souhaiter que l’appareil gouvernemental produise un maximum de valeur ajoutée. De droite, parce qu’on ne veut pas gaspiller, de gauche, parce qu’on ne peut pas s’opposer par principe à ce que les citoyens soient mieux servis à moindre coût.

Ça prend juste la trempe utile pour faire bouger les choses dans le bon sens. Et on n’aurait pas eu besoin d’élections pour que ça se passe. Il faut espérer d’ailleurs que cet enjeu ne sera pas glissé sous le tapis parce qu’il risque peu de soulever les foules. 

Donc, ça me fait plaisir d’ajouter ma voix à celle de Patricia et de tous les membres du réseau Yulbiz qui se sont empressés de la seconder. Allez commenter sur son blogue si vous êtes d’accord à votre tour avec ses doléances et son appel pour une intervention en conséquence.

Voici sa lettre:

Monsieur Charest – Le Québec a besoin d’un plan numérique

 Monsieur le Premier Ministre,

Tout récemment, l’indice du commerce électronique au Québec et Recherche Internet Canada (RIC) publiaient respectivement un rapport sur l’état de l’utilisation d’Internet au Québec et au Canada.  Suite à la publication de ces rapports, force est de constater que le Québec est nettement en retard par rapport au reste du Canada. Par exemple, avec 64% d’internautes à l’été 2007, le Québec était 19 points derrière l’Alberta qui revendiquait la première place avec un taux de pénétration de 83%.  Le rapport nous démontre aussi que l’on retrouve un écart de 15% dans les niveaux d’adoption entre les Canadiens anglophones et francophones (82% contre 67%).

Par ailleurs, l’Indice du comerce électronique au Québec rapporte qu’il y a eu pour 3,5 milliards de dollars d’achats en ligne sur un an au Québec (septembre 2007 – août 2008).  Toutefois, au moins le tiers de ces achats s’effectue à l’étranger.

    87 millions de dollars avaient abouti dans les coffres de détaillants ou departiculiers non canadiens en mars dernier (36 % des achats totaux),

    146 millions de dollars en mai (58 %),

    103 millions de dollars en juillet (33 %).

Une des raisons principales est qu’il y a peu d’offres québécoises. Uniquement 52% des PME disent avoir leur propre site internet. Et de celles-ci seulement:

   30% y proposent du service après vente,

   26% acceptent des commandes en ligne,

    7% reçoivent des paiements en ligne.

Nous sommes d’avis que les investissements dans l’économie numérique accroissent la compétitivité de l’ensemble des autres secteurs de l’économie et que la préparation d’un plan de développement de l’économie numérique est un impératif pour le gouvernement québécois.

Nous avons identifié quatre priorités :

1)      Permettre à tous les Québécois d’accéder aux réseaux et aux services numériques et  éliminer les barrières liées à la sécurité des transactions en ligne.

2)      Accroître l’adoption et diversifier les usages d’Internet dans les entreprises, en  particulier les PME.

3)      Garantir la formation aux usages des technologies de l’information dès le plus jeune âge.

4)      Implanter une gouvernance numérique.

Citoyens

Le gouvernement québécois doit garantir l’accès à tous les Québécois à Internet haut débit partout dans la province. L’Internet haut débit constitue aujourd’hui, comme l’eau, le téléphone ou l’électricité, une commodité essentielle.

Parallèlement, il est critique de renforcer la confiance numérique. Uniquement 47% des adultes québécois considèrent les transactions effectuées par carte de crédit sur Internet très ou assez sécuritaire alors que les problèmes réels de sécurité sont plus rares que dans le cas des transactions hors Internet.

Finalement, des mesures doivent être développées pour assurer la protection de la liberté d’expression des citoyens.  Un individu confiant participera activement aux débats politiques et à l’activité économique et contribuera ainsi à la santé de notre société.

PME

Alors que le développement des PME est l’une des clés de notre avenir économique, celles-ci ne disposent souvent pas des ressources ou des connaissances nécessaires pour évaluer les bénéfices qu’elles pourraient retirer des investissements en TIC et non pas, non plus, l’expertise requise pour définir une stratégie cohérente avec leur stratégie d’affaires.

Le faible taux de participation des entreprises québécoises à l’économie numérique et l’exode des dollars d’achat des Québécois sont inquiétants pour l’avenir de notre économie.  Il apparaît primordial que l’offre de services numériques doit être renforcée au Québec.  Pour atteindre cet objectif, les entreprises doivent trouver un environnement favorable au développement des outils numériques notamment par une sensibilisation accrue des PME et une aide financière à l’investissement.

Éducation

L’introduction d’une formation, dès le plus jeune âge, répond à la nécessité de donner, à chaque enfant, des compétences qui sont devenues aujourd’hui indispensables pour réussir tant au niveau professionnel que social.

À cet égard, il est pertinent de garantir la disponibilité d’un accès à Internet haut débit et WiFi dans chaque école et université, d’améliorer les synergies des universités avec les entreprises en général et les entreprises de haute technologie en particulier et de créer des incubateurs d’entreprises.

Finalement, la numérisation accrue et la disponibilité en ligne des contenus académiques et leur libre accès sont des incontournables.

Gouvernement

L’efficacité des actions « numériques » du gouvernement passera par une mise en œuvre concertée et non par un écartèlement des efforts et des budgets entre différents ministères.  Il nous appert critique que ce rôle soit regroupé sous un seul ministre avec une capacité d’agir de façon transversale.

L’administration publique doit moderniser l’accès au travail parlementaire en implantant des outils additionnels d’information, de transaction et d’échange.  La transparence doit être à l’ordre du jour et le gouvernement doit ainsi démontrer qu’il a confiance au fait que les citoyens sont d’importants contributeurs à notre système démocratique.

Il est aussi impératif que le gouvernement québécois soit un porte-parole de la neutralité du net et s’assure qu’Internet demeure ouvert et accessible à tous.

Finalement, il est important que le gouvernement provincial supporte et guide les gouvernements municipaux en matière de politiques numériques. En effet, ces derniers sont des acteurs importants du développement de l’économie numérique locale.

En conclusion, sans actions claires du gouvernement, nous croyons que le Québec court le risque de maintenir son retard et d’être laissé pour compte dans l’économie de demain. Nous vous demandons de planifier, au plus tôt, un exercice de réflexions et un plan de mise en œuvre pour stimuler l’économie numérique au Québec afin que nous puissions, non seulement rattraper le retard, mais devenir une nation qui prendra sa place et se distinguera dans la nouvelle économie. 

Veuillez agréer, Monsieur Charest, nos salutations les plus distinguées.

Regroupement YulBiz Montréal

Patricia Tessier – Consultante, Stratégie Marketing & Internet

 

Twitter bientôt indispensable en affaires

septembre 3, 2008

J’ai eu le malheur récemment de m’inscrire à Twitter après avoir tâté LinkedIn, laissé à l’état de bordel total mon compte Delic.io.us (que je ne vous montrerai donc pas) et quand même pris le temps d’entrer la presque totalité de ma blogoliste et de mes « plus meilleurs » favoris dans Netvibes (où je ne vous inviterai pas tout de suite) et m’être entretenu assez fidèlement avec ma gang dans Facebook. Que voulez-vous, ça fait cinq mois à peine que je suis apparu dans les médias sociaux après avoir collaboré un mois au blogue de Michelle Blanc.

C’est en écoutant mes collègues de Yulbiz que j’ai décidé d’ajouter graduellement des outils à mon arsenal parce je comprends très bien l’argument à l’effet qu’ils se renforcent les uns les autres. On peut notamment drainer du trafic influent sur un blogue à partir de Twitter. Mais voilà, essayer de suivre une gang de 20 ans plus jeune que soi en moyenne donne forcément des résultats moins instantanés qu’ils le disent même si ce n’est pas sorcier. Il faut aussi gagner sa croûte.

Je tire de mon expérience sur Twitter la conclusion qu’il s’agit du réseau social le plus prometteur en affaires. J’ai apprivoisé Facebook en premier parce que cette plate-forme incarne encore le meilleur carrefour intergénérationnel où l’on peut rejoindre aussi bien des contacts professionnels que les membres de sa famille. Je m’attends à conserver cet abonnement où j’irai de moins en moins longtemps, mais pour m’y activer beaucoup plus intensément parce que la nouvelle mouture de Facebook est plus conviviale que la précédente.

Je risque cependant de passer la majeure partie de mon temps alloué aux réseaux sociaux sur Twitter désormais. LinkedIn est loin de m’avoir captivé autant. Pour combien de temps serai-je accroché, je l’ignore totalement parce que les choses bougent assez vite dans cet univers parallèle.

Twits contagieux

Le malheur à propos de Twitter, disais-je, est relié justement aux risques de dépendance beaucoup plus élevés qu’avec les autres réseaux sociaux, comme l’admet lui-même l’un de ses plus populaires adeptes. Pour écrire un article sur Twitter, c’est particulièrement inefficace parce que chaque fois qu’on va y vérifier quelque chose, on s’y attarde beaucoup plus que pour les besoins de la chose.

Et en même temps, tout le temps que j’y ai consacré va vous donner un meilleur aperçu du phénomène qui, même circonscrit à de 1 à 3 millions d’utilisateurs réguliers selon des évaluations divergentes, n’en demeure pas moins remarquable. On en comptait à peine 50 000 il y a un an et demi.

La boule de neige a commencé à grossir le 9 mars 2007 à Austin au Texas lors de la South by Southwest music and digital conference où la plate-forme s’est mérité le « Web award ». Des articles ont suivi dans les semaines suivantes dans le Wall Street Journal et Business Week.

Tout le monde se pose maintenant la question à savoir si la croissance des utilisateurs, multipliée par au moins dix en un an, va se poursuivre encore longtemps. Peu importe l’ampleur que prendra la chose, TechCrunch a donné son verdict récemment et couronné Twitter vainqueur dans la catégorie du micro-blogging. Business Week s’est penché à nouveau sur le cas Twitter pour expliquer sa pertinence en affaires et Fortune a produit un article pour les nuls sur le même sujet.

À coup de sentences senties de préférence

Même si la plate-forme ne fait pas l’unanimité (les critiques les plus fréquentes ayant trait à sa futilité), son principal avantage est sa simplicité et la vitesse d’appropriation qui en découle. Conçu au départ comme une application de messages textes entre téléphones mobiles, les envois sur Twitter, limités à 140 caractères, contraignent leurs auteurs à la concision et à la clarté. Contrairement aux messages textes transmis d’une personne à une autre personne, les twits (traduction de tweet que je dois à mon amie Michelle Blanc) sont expédiés à tous ceux qui ont demandé à les voir.

Twitter a été modifié à la fin de 2007 pour inclure la possibilité de s’y brancher à partir d’un ordinateur. Les inscriptions ont alors bondi et les contenus été considérablement enrichis.

Par appareil mobile, les gens sont naturellement portés à échanger à propos de leurs allées et venues agrémentées de leur menu au restaurant ou de leurs rencontres impromptues dans leur 5 à 7 favori, ce que les critiques du canal lui reprochent en affirmant qu’ils n’en ont rien à cirer. D’ailleurs, Twitter nous y incite en affichant, dans la fenêtre prévue pour entrer son message, la question : « Que faites-vous en ce moment ? »

Avec un ordinateur, Twitter a pris davantage le tournant professionnel qu’on lui connaît maintenant. Les twits (oubliez les plaisanteries faciles auquel fait songer le mot au Québec pour comprendre le reste de cette phrase) favorisent le partage de connaissances et la dissémination rapide de l’information (d’autant plus que l’on tape au moins cinq fois plus vite avec un clavier d’ordi qu’avec un clavier de mobile). Les liens d’URL sont échangés facilement en les réduisant à leur plus simple expression avec des outils comme TinyURL ou Snipurl. Les blogueurs s’en servent pour informer instantanément leur auditoire de la parution de leurs derniers billets ou pour souligner les meilleurs articles de leurs confrères, ce qui est toujours bien vu lorsqu’on ne tombe pas dans la flagornerie.

Plusieurs tremblements de terre, y compris celui du Sichuan en Chine, ont été rapportés dans Twitter avant même que les services d’information n’en parlent. Les journalistes apprennent vite et, selon un twitt récent de Philippe Martin, ceux du Chicago Tribune ont créé en fin de semaine dernière le compte GustavReporter pour informer les abonnés de Twitter au sujet de l’évolution de l’ouragan Gustav.

Premiers pas en affaires

La circulation de l’information est optimisée sur Twitter parce que, contrairement à Facebook, on peut y suivre les activités des gens sans qu’ils n’aient un mot à dire, à moins qu’ils en bloquent l’accès pour autoriser seulement ceux qui les intéressent, ce que peu d’abonnés font. On n’a qu’à cliquer sur « follow » en bas du nom de l’abonné ou du service d’information (les joueurs majeurs en anglais (Business Week, The Economist, Financial Times) sont presque tous là) et l’on va recevoir dans sa page tous les twitts des gens qui nous intéressent. Certains vont vous retourner la pareille et s’intéresser à ce que nous avons à dire à notre tour.

Twitter a rallié depuis un an l’ensemble des évangélistes du Web 2.0 en commençant par Tim O’Reily et John Batelle qui ont été suivis par la plupart des membres de cette tribu à peu d’exceptions près. O’Reily, qui n’écrit pas beaucoup ailleurs comme Batelle, y est très actif. J’ai fait l’exercice en vérifiant qui, des individus et des sociétés citées dans ce blogue depuis ses débuts ou faisant partie de ma longue blogoliste ci-contre, avait établi une présence dans Twitter. Et j’ai dû constater que les deux tiers sont présents.

C’est tout à fait normal dans le domaine. Mais le virus a rejoint aussi des activités moins éthérées. On faisait mention ici de Bin Ends, un détaillant de vins du Massachusetts qui a informé ses clients proches ou lointains (il livre où la loi le permet) de la tenue d’une séance de dégustation en ligne. Environ 200 personnes y ont assisté et 10% d’entre eux ont commandé un des vins commentés par les goûteurs.

Plusieurs articles ont été écrits sur Twitter par les blogueurs les plus influents en matière de marketing sur les médias sociaux. Chez-nous, Michelle Blanc s’intéresse au phénomène depuis environ six mois et en a fait un tour d’horizon récemment où elle recensait un grand nombre d’entreprises déjà impliquées. Chris Brogan a produit récemment 50 idées à propos de Twitter en affaires où les 40 premières rassemblent les étapes à suivre et les aspects négatifs et les 10 dernières les bénéfices qu’on peut en tirer.

Une des principales applications qui a fait ses preuves est la surveillance de ce que l’on dit sur son entreprise dans ce canal. H&R Block et Dell, avec son compte @direct2dell, ont démontré une bonne maîtrise de cette capacité en matière de fidélisation de la clientèle. Aussitôt qu’un client signale un problème, il est cerné et confié à l’un des twitteurs affectés par Dell à cette tâche.

Même si l’utilisation de Twitter en politique par Obama n’a pas fait que des étincelles, son exemple a fait des émules en France, beaucoup plus réceptive aux vertus des médias sociaux que le Québec, au point de se mériter la une de Libération. Twitter a de l’avenir, c’est évident, dans les OSBL et les organismes socio-professionnels. Je doute cependant que sa croissance en fasse un réseau aussi populaire que Facebook avec ses 100 millions d’utilisateurs à travers le monde. Si la chose lui arrive, un autre réseau social s’imposera pour des raisons professionnelles parce que le niveau de bruit ambiant sera devenu trop grand à ce moment-là..

Note : En passant, il y a des recettes pour arriver à tout faire en même temps. Forbes et Direction Informatique viennent d’en publier des versions qui se ressemblent. Pour plonger dans Twitter en minimisant les dommages, je vous réfère aux conseils de Shell Israel aux néophytes et à la discussion sur un blogue très respectable au sujet du bruit dans Twitter d’où il ressort qu’il faut faire avec.

L’entreprise 2.0 capte l’attention de Québec Inc

Mai 16, 2008

Première partie

Un autre cap de franchi. Le Québec a atteint cette semaine une nouvelle étape dans la sensibilisation aux technologies web 2.0. À sa quatrième édition bi-annuelle, la conférence webcom Montréal 2008 a été un franc succès qui a obligé les organisateurs à faire manger les participants dans deux salles différentes. Un énorme changement par rapport à la première édition de l’automne 2006 où les consultants dans le domaine constituaient le gros des participants.

Cette année, leurs clients potentiels se sont montrés en grand nombre pour la première fois. On peut même parier que l’édition de l’automne 2008 sera forcée de déménager dans des lieux plus spacieux que ceux de l’OACI où s’est déroulé jusqu’ici le webcom. C’est dommage en un sens parce que la place est probablement la plus confortable à Montréal pour assister à une telle conférence. Sauf pour les fumeurs, dont je fais encore partie malheureusement, qui doivent se taper des contrôles aussi sévères que dans un aéroport (organisation internationale oblige) à chaque fois qu’ils vont en griller une à l’extérieur.

Les participants ont eu droit à un rattrapage intensif qui a porté principalement sur les bénéfices que les entreprises peuvent tirer des réseaux sociaux dans leur fonctionnement interne. Le premier invité de prestige était d’ailleurs Andrew McAfee, ce professeur à la Harvard Business School qui a été le premier à employer l’expression «Enterprise 2.0».

Technologies qui livrent la marchandise

La plupart des conférenciers ont souligné que les technologies Web 2.0 permettent de réaliser enfin la révolution managériale maintes fois promise par les technologies précédentes. Leur principal impact, ont-ils tous entonné en chœur, sera l’aplatissement de la pyramide hiérarchique qui résultera d’une meilleure circulation de l’information et de l’augmentation du savoir collectif.

McAfee avoua toutefois d’entrée de jeu être resté sceptique au début relativement aux vertus du Web 2.0 en milieu de travail. Il s’est d’abord dit qu’une des notions centrales de l’approche, celle privilégiant les rapports de collaboration les plus égalitaires possible entre les participants, ne pouvait pas fonctionner à l’intérieur des entreprises où la ligne de commandement descendante (top-down) prévaut encore dans 99% des cas.

Quand il a entendu parler pour la première fois de Wikipedia, il a pensé que cette plate-forme relevait de l’utopie en espérant qu’un consensus pouvait se dégager de l’écriture et de l’édition collective quand des sujets controversés viennent sur le tapis. C’est après avoir constaté qu’une entrée aussi sujette à interprétations diverses que le terme Skinhead avait été maîtrisée avec succès et donnait du mot une description honnête et très fouillée, qu’il a eu son épiphanie.

Au lieu d’assister à l’anarchie et au chaos total dans leurs échanges internes, comme le craignent tous les dirigeants effrayés d’offrir autant de liberté à leurs employés, les entreprises qui ont amorcé une démarche Entreprise 2.0 ont été forcées de constater, note M. McAfee, que leurs salariés adoptent au contraire un comportement responsable et s’entraident spontanément sans s’enfarger dans leur description de tâches. Ces comportements sont tout particulièrement le propre des travailleurs du savoir dont la productivité est nettement améliorée avec l’introduction des outils Web 2.0. Les échanges informels, qui caractérisent l’essentiel de leur activité, s’en trouvent considérablement simplifiés. Au lieu, notamment, de répondre dix fois à la même queston par courriel, ils dirigent leurs interlocuteurs vers le billet de leur blogue qui l’a déjà abordée.

Les relations professionnelles informelles peuvent être fortes, faibles et potentielles. McAfee relie à chaque catégorie une technologie appropriée. Pour les relations fortes avec son équipe de travail et les différents services avec lesquels on doit rester en contact étroit, le meilleur outil de collaboration est un éditeur wiki, un logiciel pensé en fonction de réaliser une œuvre collective. Pour entretenir les relations plus faibles, comme les gens rencontrés lors d’une conférence par exemple, les réseaux sociaux comme LinkedIn, Twitter et même Facebook sont très utiles. Pour rejoindre les gens à la périphérie de son aire d’influence, les blogues sont tout à fait indiqués.

Adhérant au concept d’intelligence collective tel qu’illustré notamment par James Surowiecki dans son livre «Wisdom of crowds», McAfee prévoit que les entreprises vont adopter dans la même foulée des outils de prédiction fonctionnant sur le même principe que le Hollywood Stock Exchange. Alimenté par l’aggrégation des estimations individuelles des amateurs de cinéma qui accordent une valeur monétaire à un film à sa sortie, ce site fournit à l’avance des prévisions qui se sont révélées assez exactes par rapport aux résultats réels du «box office» après coup. La même technique, pense M. McAfee, pourrait s’appliquer aux prévisions financières si on permettait à tous les vendeurs d’inscrire facilement et régulièrement l’estimation de leurs performances à venir.

Persuadé que l’approche nous réserve encore plus de surprises qu’elle nous a fait découvrir de nouveautés jusqu’ici, M. McAfee évalue que les entreprises vont s’engager dans des chantiers Web 2.0 au cours des dix prochaines années.

Nouveaux employés = nouveaux modèles sociaux

Deuxième grosse pointure du Web 2.0 venue de l’extérieur à s’exprimer à la conférence, le français Fred Cavazza a approuvé en quelque sorte en rappelant que la saveur du jour est passée de Second Life l’an passé à Twitter cette année. « La roue tourne. Il y a eu l’avant et l’après Facebook. C’est impossible de réfléchir à une stratégie à long terme. La barre est toujours plus haute. Nous en sommes encore au stade où il faut expérimenter », a-t-il lancé en ne rassurant pas grand monde.

Après la musique sociale avec MySpace, la vidéo sociale avec YouTube, les liens sociaux avec Facebook, la quatrième vague que les entreprises vont devoir considérer est celle des jeux sociaux, croit M. Cavazza. Pour mobiliser plus efficacement les jeunes en bas de vingt ans, leurs prochains employés, les entreprises n’auront d’autre choix que de leur fournir des outils de communication aussi puissants que ceux auxquels ils sont déjà habitués.

M. Cavazza voit toutes ces plate-formes converger vers une seule plate-forme virtuelle personnelle qui intégrera toutes leurs fonctionnalités. Il en surgira inévitablement, à son avis, de nouveaux modèles sociaux.

Il retient deux conclusions de ce qu’il a vu jusqu’ici :

  1. Le contenu est devenu une commodité. Il faut trouver autre chose.
  2. Tout est gratuit.

À partir de là, il faut trouver d’autres moyens pour apporter de la valeur. Sans recette à portée de la main, il n’en rappelle pas moins là-dessus un dicton de son coin de pays : « Le soleil brille pour tout le monde. À toi de louer des parasols.»

« Il n’y aura pas de retour en arrière », a-t-il aussi prédit.

Doubler sinon tripler la mémoire interne

Première grosse pointure locale à s’exprimer en même temps que M. Cavazza dans un atelier parallèle, Claude Malaison, également directeur de la programmation de l’événement (avec qui j’ai parlé longuement par la suite en étant toujours incapable d’être à deux endroits en même temps), s’est employé pour sa part à traiter surtout de l’impact des technologies Web 2.0 sur l’amélioration notable de la mémoire interne des organisations. Une dimension cruciale et très concrète qui risque de sourire aux entreprises aux prises avec les pertes énormes d’expérience qu’elles subissent maintenant avec le départ graduel à la retraite des babyboomers.

« Mais si seulement elles savaient tout ce qu’elles savent » affirme M. Malaison, rappelant le cas aberrant de la Nasa qui envoyait à la filière 13 les contenus des filières de ses chercheurs qui partaient à la retraite. L’agence a ainsi perdu les enregistrements de l’alunissage d’Apollo 11 et, bien pire encore, les dossiers de conception de Saturne V, ce qui lui vaut de refaire en bonne partie deux fois les mêmes travaux dans le développement actuel de son nouveau lanceur.

M. Malaison voit dix étapes dans la mise en place des technologies pertinentes. Voici l’écran où il les énumérait.

Les dix marches pour optimiser la mémoire de l\'entreprise selon Claude Malaison

En expliquant, il s’arrête un peu plus longtemps à la septième étape où l’on parle de récupérer le savoir des gens partis à la retraite. Il s’agit de les inviter à des échanges point-à-point (peer-to-peer) en extranet où ils feront part de leur expérience aux employés toujours en place. Ils seront d’autant plus motivés à participer qu’on leur offrira une rétribution pour leur contribution à la résolution parfois plus rapide des problèmes du seul fait de leur intervention.

M. Malaison se dit convaincu que plusieurs entreprises obtiendraient un retour sur investissement rapide avec cette innovation très peu chère à mettre en place. Tout en reconnaissant que la panoplie complète des capteurs de mémoire va intéresser plus volontiers dans un premier temps les grandes entreprises, il voit très bien l’intérêt des PME à s’emparer d’un tel outil sans tarder. Dessins Drummond  lui apparaît un bon exemple de PME engagée dans la bonne direction sur le plan (très mauvais jeu de mot) des outils web 2.0.

Afin de souligner leurs avantages pour les grandes entrepries, M. Malaison utilise l’exemple d’IBM où l’on est peu susceptible d’avoir lésiné sur les technologies de collaboration et de gestion des connaissances avant leur adoption massive toute récente. Si ces technologies y sont autant utilisées, c’est sûrement parce qu’elles comblent un besoin que les systèmes précédents remplissaient mal.

S’appuyant sur un article du Wall Street Journal du 18 juin 2007, M. Malaison a fait resssortir qu’IBM possédait à ce moment-là 27 000 blogues internes et 20 000 wikis fréquentés par 100 000 de ses employés. Son réseau social interne, BluePages, recensait 475 000 profils et 700 communautés. L’entreprise opérait aussi 50 îles dans SecondLife pour des séances d’orientation et de formation avec ses clients. Dans le troisième atelier parallèle, la consultante Sophie Beauchemin d’IBM (dont j’ai obtenu la présentation par courriel) a fourni des chiffres encore plus à jour. Bluepages contient maintenant 579,988 profils d’employés et accueille 1 800 communautés alors que les blogueurs internes ont presque doublé pour atteindre 47 772.

Quant au débat opposant les technologies à code source ouvert et celles qui sont propriétaires comme Lotus Connections d’IBM. une trousse qui intègre tous les outils Web 2.0, M. Malaison croit qu’il devient secondaire si les deuxièmes sont plus rapides à implanter en étant conformes aux façons de faire jusque là. Le plus important, c’est l’impact au niveau social et non pas la technologie qui le provoque.

Vous en savez assez pour aujourd’hui. Je reviendrai demain ou lundi au plus tard pour vous entretenir un peu plus du message de Mme Beauchemin, mais également de celui de sa collègue Kathryn Everest qui a pris la parole après Pierre-Karl Péladeau, l’invité de prestige du milieu de la journée. Je donnerai un aperçu des ateliers de l’après-midi donnés par Jon Husband (autre grosse pointure du Web 2.0 venant de l’extérieur, puisqu’il réside à Vancouver, qui apporte un éclairage très original au phénomène et qui m’était encore inconnu jusqu’ici, dois-je avouer à ma plus grande honte). Vincent Berthelot et Bertrand Duperrin, qui ont livré pour leur part des études de cas à la RATP et chez Dassault en France.

Pour ceux et celles qui veulent prolonger le plaisir en attendant, mon amie Michelle Blanc a commis un billet de lendemain de veille où elle nous amène dans les coulisses. Isabelle Lopez a signifié live sur le blogue de la conférence  sa déception face à la performance offerte par McAfee et son admiration pour les propos tenus par Fred Cavazza. Comme quoi il ne suffit pas d’être pape dans la blogosphère pour que tout le monde sans exception se prosterne. Bravo Isabelle.

P.S.: L’infatigable Fred Cavazza a eu le temps de faire du tourisme, donner sa conférence, enregistrer des vidéos avec ses confrères et faire un résumé succinct de presque toutes les conférences et ateliers qui ont retenu son attention. On y trouve le point de vue d’un expert sur les experts.